Extraits et photos, collection ordinaire

1. Extrait de Amas ouverts de Stéphanie Ferrat, texte et peintures (2008)


à la surface d'une nuit
noyaux
l'un vers l'autre

cercles autour des laines
l'inverse dans le noir


2. Extrait de Trolle de Caroline Sagot Duvauroux, encres de Jean-Paul Héraud (2008)

 

quand
sueur d’eau douce l’aube à pré
va la route bécasse ! bec au vent d’avant
plonger
vers l’irrattrapable sans cesse


3. Extrait d’Un monde plus loin, de Ludovic Degroote, peintures d’Odile Fix (2008)


je regarde le ciel à travers le chant étroit des
briques je découvre des terres oubliées
c’est ainsi que je vis
collé à ce qui disparaît


4. Extrait de Jour cinq, les noix de Louise Warren, dessins de Sylvie Lebon (2009)

 

jour cinq, les noix
le geste attentif et lent
soulève une douce chaleur

 


5. Extrait d’Où vas-tu dans la forêt ? de James Sacré, photographies de Magali Ballet (2010)

 

Le froid dans les doigts, le travail

longtemps
À chaque fois comme si la forêt défaite
La peur apaisée dans la lumière, pourtant                                          

Rien de si tranquille
On a tout compris malgré que causer
fort
Nous affirme en gestes sûrs.


6. Extrait de Rencontres en chemin de Thilda Lehacque, encres de Pierre Passani (2010)

 

Une blanche iris
sur la falaise striée
fonte des neiges


7. Extrait de Fente de l’amour de Christiane Veschambre, dessins de Madlen Herrström (2011)

 

les lumières
dans la nuit de l’après-midi
ville
la nuit comme une neige
épaisseur chaude
savoureuse
ton épaule
me consiste


8. Extrait de Territoire extérieur d'Anders Hallengren, dessins de Madlen Herrström (2011)

 

Qu'est-ce donc qui nous a mené
Vers ce chemin
De nuages blancs-monologue,
Monologue des temps lointains
Nous lançons des appels dans l'espace

À vouloir se jeter
Les bras ouverts dans l'interminable vent
Hésitant, doutant, désespérant, disparaissant


9. Extrait de Vibrations des silences de Marie Rousset, dessins de Françoise Cuxac (2012)

 

volatile ou magma
je ne sais pas le
nom d'une origine


10. Extrait de Prose de l'Arbre de Gérard Lecomte, dessins de Mitsuo Shiraishi (2012)

 

Les voix

L'arbre du soleil vert portant des lumières, des   


boutons d'or, lanternes pour éclairer la route.

Mon arbre mangeur d'étoiles, pluie de pétales
d'un blanc pur sous la lune.

Qu'il redevienne herbe, simple brin d'herbe.


11. Extrait de Route de Mary-Laure Zoss, peintures de Philippe Guitton (2012)


sur dos fendu, pour quel aller ou retour à flanc de ravin tiré, le vide tenu par ses tranchants?
poignant décompte, sur cette même route, des caisses, des caisses encore on inventorie, qu'on pourrait bourrer, des fondrières et tessons de schiste; chevillés aux parois de la nuit les néons lèvent la poussière sous les câbles.


12. Extrait de Étoilement de Nicolas Jaen, photographies de Danièle Flayeux (2012)

 

Le froid   ce méditant   a ridé le chemin d'unlivre d'eaux
Gel, une circulation d'oiseaux   polaires   des pensées de
Givre des   fleurs fossilisées   leur soeur de pluie   s'évase en-
dehors des routes   jonchaies parallèles   halètements de bêtes
Ou rien   la terre dort nue   tourmentée   sa couverture glisse

Mes pas   aujourd'hui   reculent   devant l'arbre ressuscité
Le fruit a   le temps de vivre   au dos de la plus jeune feuille


13. Extrait de Déclives de Nicolas Jean, photographies de Danièle Flayeux (2012)



Brèves lacérations   roches aux entrailles   leurs   mains nues leurs   émois
La pierre qu'ombrage son poing   relance un pan de nuit   à n'égarer pour rien
Au monde depuis la perte   qu'il fallut reperdre toujours   pour se continuer
Et décider l'empierrement   ici   du tracé de son pas   de ses mains négatives
Prendre   par la foulure   le foulé de la première herbe   la rosée qu'on disperse

Par l'ombre du nuage   la mue successive   et l'indépendance du fruit dans l'arbre
Au plus bas il sera croqué   ou fermentera   de quelque chose rond la figure appuyée


14. Extrait de Huit variations de Cédric Lerible, peintures de José Renucci (2012)


Couché là dans l'effervescence de l'écriture
- mais ne serait-ce pas un repos? - le mot
cherche sa verticalité à l'aplomb de la page.

 

Vaine trace qu'un nouveau cerne croit
délimiter. La main peut-elle apprivoiser
l'esprit? Le corps s'allonge, poursuit sa casse.
Qu'un accident vienne témoigner d'un nouvel
état, fer ne vaut pas acier sur l'enclume.


15. Extrait de Il ne suffit pas d'un tas de cendres pour faire un homme de Corinne Le Lepvrier,peintures d'Isabelle Marcelin (2012)

 

désormais
te voir de loin
te voir à perte de vue

combien de temps
raisonnablement
pour de cendres devenir cantique ou vent?


16. Extrait de Pris de froid de Pascal Commère,gravures de Martine Rastello (2012)

 

La terre parle il dit, la
salamandre parle

Et tout
ce qui

dans l'épais
du langage

parle

La terre. La matière
tue


17. Extrait de Coller d'Antoine Emaz, collages de Vincent Courtois (2013)

Et qu'est-ce que nous faisons, à longueur de vivre, sinon coller du présent sur de la mémoire ou du désir, et inversement, de la hantise sur du réel, et inversement, dans une perpétuelle quête de sens pour ce qui n'en a pas?


18. Extrait d'Exitoire de Billy Dranty, encre d'Hélène Marcellin (2013)


En finir. Avec le rite d'insuffler
vie au pire, de boomeranguer
tout uppercut. Glas d'obéir
à la toute clarté noire des

accablants vices d'A.
Décontamination.

 

Broc reversé
déversant laid de trop
vu. Les torts sont partagés
mais le partage est mort. Vitale
déconnexion et le vide pour décor.


19. Extrait de Pensée brûlée idem de Rodrigue Marques de Souza, peintures de Stéphanie Ferrat (2013)


Istanbul
en une seule fraction
dans le coeur


moins que cela

en moins seul qu'une nuit
une part moins seule de nuit
une part

une brève part de temps
la fraction venue comme les deux mains
sur mon cou inexistantes

en une seule nuit une fraction
contre une part de temps
sur
mon
cou

oublié


20. Extrait de Perfusion d'obscur de Francis Coffinet, photographies de Mireille Pélindé Rian  (2014)

 

Corps pur
corps impur -


rémanence du poème.
Je tiens l'horizon comme un fer rouge
                                      dans le creux de ma main.

Glaciation à l'intérieur de l’œuf,
je glisse en toi d'immenses plaques de grès et de temps.


21. Extrait de Arrêt dans la montagne d'Alain Freixe, peintures de Francine Irissou (2014)

 

quand ce qui monte
des blocs de pierre
rencontre cette lumière
en crue
qui dévale les pentes
du ciel
tout est dans le heurt
le choc
la perte de l'un
dans l'autre


22. Extrait de Plus tard, il pleut de Daphné Van Hansen, peintures de Simon Ortner

 

plus tard, il pleut

l'encre fond sur la page
laissée là sur la table
du jardin calme

23. Extrait de Visages de Jean-Louis Clarac, dessins de Catherine Dupire

 

soleils recommencés
ils sont mille et cinq visages
sans compter
tous les autres
aux mille et six visages
dans le tourbillon de
la vie à la mort


24. Extrait de Estives de Romain Fustier, peintures de Patricia Monbel

 

un sentier coupant les pâturages voici les estives semées de moutons de
mai à octobre qu'on découvre au détour d'un virage on s'arrête à cette 
altitude

25. Extrait de Je ne sais pas dessiner de Pierre Soletti, desssins de Guy Calamusa

 

je ne sais pas dessiner la nuit
                         dans son sommeil




                         ce qui remue dessous la cosse
                                        qui démange


26. Extrait de une cicatrice de Pierre Bastide


Et voilà qu'aujourd'hui, revenu dans ma vie de l'autre côté de l'amer, dans cet autre présent de l'espace mental, je me prends à rêver de ce que j'ai raté. Au lieu de regarder, au lieu de lire ce qui m'était offert, sur la page murale dont le présent me faisait présent, j'avais voulu revoir ce qui était dans ma tête, et qui n'existait plus...


27. Extrait de L'être sylve de Lleann, dessins de Jean-Gilles Badaire

"en relief adéquat, baumes à portée de voix,
il cuit un pain des morts et enfouit près des tombes
la syntaxe bleuie, l'échelle du récit"


28. Extrait de Quoi la musique d'Emmanuelle Laurent, dessins d'Anne Roche


"Il y a les pieds. Il y a le sol.
Et, entre les pieds et le sol, rien. Un corps dur. Des pas rapides. Vite enchaînés l'un à l'autre sans attendre, sans faire attention à ne pas heurter, à ne pas tomber.
Des pas qui ne font plus chemin."


29. Extrait de l'herbe noire de François Coudray, peintures de Jean-Michel Marchetti

 

et c'est matière d'être rendu à

l'éphémère dans la danse des ombres

grandes et des lambeaux de lune,

étranges ramures, entre les blocs, dans

la combe


30. Extrait de I I d'Émilien Chesnot et Stéphane Korvin

 

personne n'a compris

comment

la brûlure a fait neiger

 

notre disparition


31. Extrait de Du dernier souffle de Béatrice Machet et Henri Baviera

 

Ce qui se voit

               juste un fil depuis les yeux

               juste un filet de voix

              un tissé de peau

              c'est par nos mains que le monde

              veille son avancée

 

              sans projeter

              ni ombre ni futur

              c'est nu ce qui se joue à vêtir

(...)

 


 

 

                                                                                                                                                                        Les 3 livrets ci-dessous font partie d'une même publication

32. Extrait de Lignes de partage de Juliette Penblanc et Muriel Quesne

 

Sur le chemin des pierres

on ne peut pas tomber

on avance sur le ciel

avec

dans la main

quelques plumes

c'est un bouquet d'oiseauX

 

On garde sous le pied

le solide du rocher

un socle pour marcher

marcher

marcher encore

trouver l'essoufflement

 

33. Extrait de Prendre langue de Delphine Eyraud et Juliette Penblanc

 

Un dos dévoré par le soleil et les insectes

un être qui n'ose pas

pourquoi tourner le dos à l'histoire?

est-ce l'Amazone?

cela commence, tout commence

là où le pont s'est effondré

 

en attendant

la vie s'organise sur la berge

savoir que les routes s'arrêtent

au milieu de la forêt

qu'elles ne reprendront peut-être jamais

 

34. Extrait de Tout part peut-être de Muriel Quesne et Delphine Eyraud

 

Entre hélianthèmes

Lichens et arbres hirsutes

Il suit le chemin du vide

En marche

Bosselée ou dentelée dans l'ignorance du dedans

Des fleurs fanées des écorces friables

S'échappe des mouches

Suit la courbe du sentier évite les lignes de fourmis

S'essouffle

En marche encore pépiant

Avec le casse-noix moucheté ficficficficfic

Des cailloux roulent

Il s'arrête

Il en est là et il n'est pas sûr

 

Tout part alors qui sait du coquelicot de roche

Du lac noir grêlé ou d'un pli de lumière


35. Extrait de Bihar Boys de Mary-Laure Zoss et Philippe Hélénon 

 

     des dernières barres de neige descendues, ravines et giclées de basalte; suffocante à leur bouche la noire étoffe du diesel, l'encre à plein gosier de la route parmi le charriage des caillasses; et leurs coups de pelles éblouis, leurs trébuchantes manœuvres dès le point du jour à l'encontre des bourrasques; pour une poignée de roupies aveuglément livrés aux démons telluriques; harassante saison à tâcher d'en découdre avec l'altitude, subjuguer vertige et flambée du ciel


36. Extrait de Mouron de Manon Thiery et Marc-Antoine Bartoli

 

une mère

elle est dans la cuisine

elle nous fait du mouron

c'est midi

on mange le mouron

personne n'aime le mouron

tout ce midi revient toujours


37. Extrait de la photographie absolue de Nicolas Jaen et Éric Principaud

 

Le pain perdu des gestes

anciens

où l'on courait dans les flaques,

où l'ombre ne pesait pas sur l'eau,

comme tout ce qui se laissait toucher mordre jeter,

pour la toute première fois.

 

L'absence de  la pluie te parle de la pluie.


38. Extrait de L'objet de Jacques Roman et Philippe Hélénon

 

nu l'être

du gouffre venu

 

passionnément pris

sous l'aile immense

du firmament

 

à son cœur alors

flèche l'objet

venu de nul arc

 

se peut-il que saigne

l'objet et

encore à cette heure

où tant de sang coule

l'objet

décoche

l'éclair d'un orage

amoureux


39.  Extrait de Fatigue éblouissante de Joël Vernet et Jean-Gilles Badaire

 

Pères, dans la lumière

du soleil.

Pères qui n'êtes

jamais venus dans le feu

de notre enfance.

Jamais venus vraiment,

 

comme perdus.

 

Stèles du souvenir

quand l'automne

offrait ses feuilles,

à la gourmandise des nuages.


 

 

 

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